dimanche 16 juin 2013

Les voies d'Anubis - Tim Powers


Que peut vous offrir la vie quand vous êtes un professeur entre deux âges, dans une université de seconde zone, spécialisé dans un poète méconnu du XIXe siècle anglais, et que vous buvez pour oublier une vie essentiellement remplie de regrets ?
Pas grand-chose, n’est-ce pas ?

Et bien, selon Tim Powers, c’est précisément à ce moment-là que vous devriez commencer à vous méfier.
Brendan Doyle, spécialiste du très oublié poète William Ashbless, est embauché par un richissime excentrique pour donner une conférence sur Coleridge. Conférence fort bien payée, affaire rondement menée, croit-il.
S’il se doutait que les pages suivantes vont le conduire, et nous aussi, lecteurs émerveillés, au coeur d’un Londres XIXe fantasmé, brumeux et inquiétant, égayé de dieux Egyptiens, de magiciens et de créatures monstrueuses, accepterait-il cet étonnant contrat ?

Et dans une superbe édition Bragelonne, en sus !
J’espère bien que oui, Les voies d’Anubis étant un étonnant tour de passe-passe, où Tim Powers associe une excellente connaissance du XIXe, un concept joliment troussé à base de voyages dans le temps et d’histoire dans l’histoire (je n’en dis pas plus, mais lorsque le récit commence à jouer les poupées russes, le lecteur se régale), et un personnage, Doyle, qui gagne en humanité et en sympathie à chaque chapitre.

L’auteur joue avec les codes du roman XIXe en convoquant quantité d’images bien connues : Bohémiens, sorciers, mendiants, loups-garous... et utilise Brendan, héros et spectateur moderne, comme caution réaliste : que faire quand on est coincé dans le passé sans argent, et qu’on sait à l’avance ce que sera le destin de la moitié des gens qu’on rencontre ? Utiliser ces connaissances, bien sûr. C’est ce que va faire le héros pour se tirer de ses ennuis, et c’est sans doute ce qui fait une bonne partie de l’originalité du roman : son savoir universitaire tire Brendan d’affaire plus d’une fois, donnant à toute l’intrigue une certaine honnêteté et un semblant de réalisme. Pas de pouvoirs magiques, pas de réactions super intelligentes ou de prouesses physiques : dans une fantasy gangrenée de personnages tous plus exceptionnels les uns que les autres, la médiocrité du héros de Powers est agréablement rafraîchissante.

Enfin, si je devais en quelques phrases vendre ce roman, je dirais : c’est Londres au XIXe, c’est l’ancêtre du Steampunk, avec une rythmique phénoménale et un gros et savoureux retournement de situation au milieu. C’est du bon.


Les Voies d'Anubis / Tim Powers, Bragelonne - 2013 ; 480p.



PS : Et mille remerciements à Eileen, à qui je dois cette excellente lecture !!

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